Transformation, changement, évolution, modification… tous ces mots sont au cœur de la démarche du yoga
En effet, le propos du yoga, c’est de transformer notre psychisme, notre mental (quand j’emploierai le terme de mental, il est à comprendre comme psychisme, c’est-à-dire englobant les émotions). Le yoga est un chemin qui amène changer en nous ce qui va être cause de tensions, tiraillements, douleur, souffrance.
Mais dans ce chemin de transformation, l’idée n’est pas de changer ce que l’on ne peut pas changer. Exemple facile et évident : vous et moi ne pouvons pas faire grand-chose pour changer la situation actuelle de confinement. Et le yoga ne va pas nous donner des outils pour ça. Le yoga nous propose de changer ce sur quoi nous avons prise : dans le même exemple, c’est la manière dont nous pouvons traverser cette étape de confinement sur laquelle nous pouvons agir.
Nous vivons un moment de notre vie complètement inédit. Aujourd’hui, 67 millions de français vivent une transformation profonde de leur vie. Et ceci se fait à l’échelle mondiale. Le virus Covid 19 transforme le quotidien de millions et de millions de gens. Et parfois de manière très radicale. Etre obligé de rester chez soi, sans contacts physiques avec les autres, sans parfois d’activités professionnelles, dans un monde de mouvements constants, de travail ++, de déplacements à outrance… Ça, c’est un changement énorme.
Cette transformation extérieure mondiale s’accompagne de transformations au niveau individuel. Notre vie n’est plus la même…. Et nos réactions vont être différentes par rapport à cette situation. Différentes selon les personnalités de chacun, différentes d’un jour à l’autre, d’une semaine à l’autre.
Le yoga nous dit que nous avons la possibilité d’agir, d’être actif sur la manière dont notre système va réagir. L’idée n’est pas de changer pour changer, mais de transformer ce qui, en nous, peut être source de souffrance, de tension, de tiraillement : les craintes pour notre avenir, la sensation désagréable de ne plus maîtriser notre vie, de subir une situation, la colère, le regret d’avoir dû arrêter certaines choses dans nos vies, la non-acceptation de la situation de confinement etc. etc.
Toutes ces réactions émotionnelles peuvent amener de nombreux désagréments pour nous et notre entourage. Alors comment faire ? Le yoga nous propose de nombreux d’outils pour arriver à apaiser notre psychisme, notre émotionnel. Le chemin du yoga est un chemin de pacification du mental. Et ce chemin demande de la patience et de la pugnacité.
Voir, observer : les yoga sûtra nous invitent à nous observer. Pour comprendre notre fonctionnement. Observer nos réactions, nos émotions, nos manières d’agir. En ce moment, voyons ce qui se passe dans notre système face à la situation surréaliste que nous vivons. Que ce bouleversement extérieur puisse nous apprendre quelque chose sur nous-même.
Svâmi Prajnânpad, qui était un sage indien, un scientifique et un intellectuel de haut niveau, ne cessait de répéter à ses disciples : « Ne pensez pas, voyez ! ». Il ne voulait pas les empêcher de se cultiver ou les détourner de la réflexion, mais les inviter à développer une attitude d’observation. Ne pas s’accrocher pas à ses idées, ses opinions, ses croyances. Observer. Regarder. Voir comment fonctionne le mental, les pensées qui l’agitent, les désirs qui l’animent. Cela peut se faire en postures, lorsque nous sommes en contact avec nous même, avec le corps : quelle est cette sensation ? Comment arriver à étirer plus ici ou là ? Quels sont le nœuds, blocages du corps ? Cela peut se faire dans toutes les techniques respiratoires : par exemple, durant les suspensions poumons pleins, on peut prendre le temps d’observer ce qui se passe dans le corps, dans le mental lorsque le souffle est suspendu. Cela se fait aussi dans tous les moments d’introspection, et bien entendu en méditation. La méditation est un temps d’observation de soi, du mental.
Accueillir : une autre attitude que nous sommes invités à prendre – tout du moins, à essayer de prendre – est celle de l’accueil. L’accueil de « ce qui est. » Svâmi Prajnânpad conseille d’apprendre à dire « oui ». « Il vous faut dire « oui » d’abord et en premier lieu. » disait-il.
Être dans une attitude mentale qui ne rejette pas systématiquement. Ce rejet de ce qui est, est une des principales sources de tensions, de souffrance. Difficile à mettre en place pour des choses graves, trop douloureuses, cette attitude d’acceptation est indispensable dans beaucoup de situations du quotidien pour apaiser, alléger notre système.
Cette attitude n’a rien à voir avec une résignation, une passivité, une soumission défaitiste. Elle est une attitude réaliste et positive. «Ce qui est arrivé, est arrivé », « ce qui est là, est là», et c’est de là que nous partons dit Svâmi Prajnânpad. Il ne sert à rien de se perdre en regrets, remords, récriminations, c’est du temps et de l’énergie perdue. Acceptons la réalité des choses, aussi désagréable soit-elle, et voyons si nous devons et pouvons faire quelque chose. Loin de désactiver l’énergie, l’acceptation lui donne une base réaliste à partir de quoi elle va pouvoir se déployer. Ne pas accepter est souvent très énergivore. Ne pas accepter le confinement. Ne pas accepter ce que l’on est. Partir de ce qui est. De là où nous sommes. De qui nous sommes. Une attitude d’ouverture qui pacifie, fatigue moins, permet moins de tensions. Une attitude de regard neutre sur ce qui arrive, de non jugement, de non attente.
Bien entendu, ce type d’attitude ne s’acquière pas du jour au lendemain. Bien entendu, il faut commencer par de petites choses du quotidien. Accueillir au quotidien ce que l’on ne peut pas changer et qui, au final, n’est pas si grave. Il n’y a plus d’huile d’olive au magasin en bas de chez moi. ? Pas grave, je ferai avec une autre huile. Sans crispation. Je ne peux plus acheter de livres ? C’est OK, je vais relire certains livres adorés dans le passé. Je devais fêter mon anniversaire avec des potes et faire une mega teuf ? J’organise une fête Zoom et revisite ma manière de me relier à mes amis etc.
Se connaître, savoir comment on fonctionne pour aller vers une manière d’agir plus juste. Agir en accueillant se qui est. Une action débarrassée de volontarisme. Juste pour l’action.
Pratiquer des postures juste pour pratiquer et observer, dans une attitude globale détendue. Respirer en conscience juste pour respirer en conscience, sans chercher un résultat. Méditer juste pour être là. Sans attendre d’effets particuliers. Sans se sentir déçu de voir que son état intérieur n’est pas tel qu’on le voudrait